Test : Sang-Froid, canin-placable
Pour accompagner le test du jeu Sang-Froid, notre podcasteur Belhoriann a réalisé pour vous une nouvelle présentation vidéo après celle - publiée il y a quelques jours – sur Evoland. Vous pourrez trouver ladite vidéo en fin de test, et n’hésitez toujours pas à faire part de vos impressions à notre podcasteur afin d’en améliorer le contenu et son propos.
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Test : Sang-Froid
Sang froid est fourbe. Il est fourbe, car il cache bien son jeu. Brut de décoffrage, il se cache derrière une esthétique austère, et un air de jeu pas fini et mal designé il essaie de ne pas se faire remarquer, tout en vous donnant des petits coups de coude dans l’épaule. Il ne sait pas ce qu’il veut, mais on sait ce qu’il mérite : votre attention.
Le pitch est simple : deux frères, une sœur, le tout canadien. L’un des deux est ermite, vivant à l’extérieur du village et l’autre se trouve dans la ville au coté de sa sœur. Cette dernière travaille en tant que servante dans l’église, et alors que le prêtre local, incapable de se retenir plus longtemps, tente de la violer, elle met involontairement feu à l’église avec le candélabre utilisé pour l’assommer. Rapidement, il tourne la situation à son avantage, prétendant que la demoiselle était l’entière responsable. Défendue par son frère, Josy, tous deux sont contraints de quitter la ville, allant retrouver leur frère Jacky dans sa cabane.
Mais bientôt, la fièvre s’empare de la jeune fille, et elle se met à délirer, prédisant l’arrivée de loups et autres consorts canins tout aussi agréables. Pendant ce temps, le prêtre conclut un pacte avec le diable, pour obtenir la jeune fille, et ça commence à sentir le roussi pour les deux frères.
Vous l’aurez compris, le scénario ne brille pas par sa complexité ni par sa profondeur. Toutefois, on appréciera la façon dont chaque personnage représente un symbole, un stéréotype, le tout de façon très claire. Et, il faut bien l’avouer, c’est l’ambiance et le contexte qui sont surtout attirants : le Canada, fin du XIXème siècle, avec des restes de haine entre les indiens et les Blancs, comme ils les appellent, qui vont s’emmêler pour offrir une vision très stéréotypée, mais finalement très intéressante de la situation, le tout saupoudré de fantastique avec ces créatures de légende, et d’autres encore.
Comme son nom l’indique, le jeu tourne autour des loups, et des loups garous. Le Diable va passer par ces créatures pour atteindre la jeune fille, et le jeu se veut sorte de mélange entre tower defense, et… Pseudo jeu d’action. Détaillons chaque partie de ce gameplay.
Chaque niveau se passe pendant la nuit, lorsque les loups arrivent. Le terrain de jeu est constitué de la cabane des deux frères, ainsi que d’autres bâtiments, tels que le poulailler, ou encore la cabane d’un de leurs amis, s’occupant de la scierie. Vôtre but est de protéger chacun de ces bâtiments, et chaque nuit est découpée en vagues.
Une vague voit spawner plusieurs ennemis, allant du simple loup au Great Werewolf, clairement plus dangereux, et chacun de ces ennemis a un point de spawn fixe, un nombre précis, une cible et un itinéraire. Vous démarrez donc dans une vue du dessus, permettant de voir toutes ces infos, et de placer des pièges. Chaque piège coûte des AP, ainsi que, parfois, de l’argent. Les AP sont représentés par une barre, initialement pleine, qui se vide un peu plus à chaque piège, limitant le nombre que l’on peut mettre. Evidemment, un simple piège à loup classique coûtera moins d’AP qu’une fosse remplie de pointes, mais il coûtera de l’argent, tandis que la fosse sera gratuite. Il faut donc bien gérer le tout.
Les pièges sont assez variés, et on s’éloigne totalement des classiques du genre. On retrouve le piège a loup, tuant ou immobilisant (en fonction du gabarit), un filet suspendu, recouvert de pierres, qu’il faut actionner manuellement, des pointes sortant du sol s’il y a assez de loups au dessus, un mur de feu pour bloquer un accès, deux tours entre lesquelles on peut tirer une tyrolienne… C’est original, et intéressant. Une fois que vous avez bien placé tous vos pièges, direction votre inventaire. Vous pouvez y changer votre hache, votre fusil, ainsi que vos consommables et vos balles. De même, vous avez accès à un skill tree massif, offrant de très nombreuses compétences, touchant à tout, et un peu différent en fonction de si vous jouez avec l’un ou l’autre des frères (chacun correspondant à un mode de difficulté). Vous pouvez améliorer /changer le comportement de vos pièges, gagner des bonus et nouveaux mouvements en combat, etc. Et surtout, ce qui est appréciable, c’est que ces skills sont originaux, et vraiment actifs. Pas de pauvre “+1% de dégats”, mais de vrais, bons skills. Et ça on aime.
Enfin, avant de se lancer dans le coeur du jeu, on peut faire un tour en ville. Là, on pourra y acheter divers objets, consommables, équipements, ou encore faire bénir ses armes au couvent. Une fois que tout est prêt, il est temps de démarrer la nuit ! On se retrouve en vue à la troisième personne, notre brave bûcheron équipé de sa hache, de son fusil et de sa paire de c... Bref. Et là, l’enfer se déchaîne.
Contrairement à d’autres jeux similaires, Sang Froid se veut… particulier. Le décrire correctement est assez difficile, par ailleurs. Votre hache vous permet de donner des coups au corps à corps basiques, autorisant un combo de trois coups finis par un knockback. Une fois une jauge remplie, vous pouvez déclencher une attaque spéciale, très puissante et avec un stun. Votre fusil quant à lui est assez particulier : il faut laisser Ctrl appuyé, et spammer le clic droit pour le recharger. Eh oui, on est pas au XXIème siècle, on n’a qu’une seule balle avant de devoir recharger la bête, et ça prend un sacré temps.
Du coup, ça rend son utilisation extrêmement stratégique. Est ce qu’on l’utilise pour caler un headshot à un ennemi ? Pour déclencher un piège… ? Les combats ont également une autre spécificité : l’intimidation.
Concrètement, votre personnage a un score d’intimidation (par exemple 40). L’ennemi aussi, et approximativement à chaque seconde qui passe, le sien augmente. Donc si vous êtes face à un loup qui a un score de 30, tant que vous n’approchez pas trop, il décrira un lent cercle autour de vous, sans attaquer. Toutefois, dès que son score arrive à 40, il essaiera d’attaquer.
Son score peut être descendu en lui mettant des grandes baffes dans la tronche, ou en utilisant le cri, un skill avec cooldown, intimidant tous les ennemis. Si ce mécanisme est assez simple en 1 contre 1, il prend réellement tout son sens lorsque l’on affronte une meute (et ça arrive souvent), et il est surtout étonnamment réaliste. Rapidement, les loups vous entourent, et il faut viser en priorité les plus téméraires, le jeu indiquant très correctement quel loup est le plus proche d’attaquer.
Mais ce n’est pas tout. Hors combat, le jeu accumule également les petits détails. Par exemple, vous avez un cercle autour de vous (modélisé sur la minimap) indiquant le bruit que vous faites. La gestion du bruit est très importante pour piéger les loups. Vous pouvez par exemple vous mettre sous un piège, et lancer le cri, qui alertera tous les loups dans la vicinité. Alors, ils ne vous reste plus qu’à vous cacher un peu plus loin, et dès qu’ils sont amassés sous le piège, vous cherchant, il suffit de tirer, et de tout faire s’écrouler sur eux.
C’est une technique primordiale, et permettant des plans très diversifiés. Mais ce n’est pas tout. Rapidement, le vent se mêle à la partie, et évidemment, les prédateurs peuvent sentir votre odeur. Il faut donc adapter sa position, ainsi que ses plans, en fonction du vent. L’odeur se répand très loin, et c’est rapidement un vrai casse tête de choisir la position adaptée pour éviter de se faire repérer.
Vous l’aurez compris, c’est bien plus complexe que ça n’en a l’air. Au début, on se dit que c’est rigide, franchement mal foutu. Mais très vite, on se rend compte que cette rigidité sert un gameplay implacable. Il faut réfléchir chaque action, chaque coup, vu qu’on a une barre d’endurance, et que les ennemis sont nombreux et mortels. Le jeu demande une planification de tout instant, que ce soit dans les pièges, ou dans les actions, et chaque nuit devient un jeu d’échecs : on place, on prévoit, on essaie de suivre un plan. Si on a bien prévu, tout passe comme sur des roulettes, mais si on s’est mal débrouillé, il faut alors improviser.
Du coup, on n’en veut pas à Sang Froid d’être pas très beau. Les modèles taillés à la serpe, les textures somme toute banales, les animations un peu bancales… On oublie tout ça, parce qu’artistiquement, c’est froid et sombre, comme on en attend d’un jeu avec des loups garous, et ça envoie quand même pas mal. On oublie parce que le jeu a ce cachet inimitable, une bande son a la fois stéréotypée et servant parfaitement le jeu, avec des doubleurs qui ont tout juste assez de crédibilité. Précisons que le jeu dispose d’un doublage français, ou plus précisément Québecquois, un plus non négligeable, et qui contribue grandement à l’ambiance du jeu.
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Sang Froid, c’est un peu comme une pierre précieuse. Elle n’est pas taillée, ne paie pas de mine, mais regorge pourtant de richesses. Du coup, ne pas se fier à ses premières impression devient d’autant plus important que le jeu, a chaque nuit quasiment, introduit de nouvelles mécaniques, de nouveaux détails, de nouveaux pièges encore plus originaux, et qui vous feront bien réfléchir. Sang Froid est une prise de risques faite avec des moyens pas forcément énormes, et clairement, c’est une prise de risques qui se récompense.
Résumé
Les + Les - L’esthétique froide et sombre, l’histoire claire et très symbolique, un gameplay regorgeant de bonnes idées et de détails, une customisation poussée des compétences et équipements du personnage, des pièges originaux Graphiquement franchement pas top, un peu vide au niveau sonore, très brut de décoffrage
Score du jeu :
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Sang-Froid – Test et Impressions avec Belhoriann et Faust
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Très bon article!
Toutefois j’aurais mis un 90% pour ce jeu, car premièrement de mon point de vue, les graphismes ne sont pas si inintéressant que ça (tu dois surement y être attaché plus que moi). Et deuxièmement (et là je pourrais te reprocher de ne pas en avoir parlé) la bande son au niveau des dialogues pour la version française est absolument mythique! Combien de bande son sont faites en Québécois et non en Français? Moi je trouve que c’est une partie très importante à l’ambiance générale, tout comme les quelques pistes de musique trad, qui sont bien que discrète, très bonne à l’écoute.
Merci
En ce qui concerne les graphismes, techniquement on ne peut pas dire que ce soit franchement top. Artistiquement je suis tout à fait d’accord, mais techniquement, pour moi on est proche d’un The Path : pas franchement beau, mais avec une esthétique assez sombre et froide très, très réussie. Donc clairement je ne l’ai pas beaucoup sanctionné sur ce point.
Pour la bande son, c’est très bon à savoir, à vrai dire je fais toujours les jeux en anglais, donc je ne m’étais pas demandé comment c’était en français. J’y jetterai un oeil et j’éditerai surement le test pour ajouter cette remarque, c’est effectivement très intéressant.
Pour finir, difficile de noter un jeu comme ça. A mes yeux j’aurais pu lui mettre 90% comme j’aurais pu lui mettre 70%, et j’ai préféré faire une moyenne. Je préfère que les gens se réfèrent au texte, pour un jeu comme ça, plutôt qu’à la note !
Je dois avouer que ton test m’a donné très envie de tester ce Sang Froid. Bien écrit Faust, comme d’habitude
J’accroche pas des masses au graphismes, mais le concept est génial, et l’ambiance qui s’en dégage peut bien me plaire. Bon test !