Le jeu de stratégie nouveau est arrivé ! Endless Legend, le dernier opus du studio Amplitude, vient tout juste de sortir de son early access sur Steam. Si sur le papier, cet énième 4X semble en avoir sous le capot, ses promesses sont-elles tenues jusqu’au bout ? Réponse dans ce test.
Est-il encore nécessaire de présenter Amplitude, les Parisiens derrière Endless Space et le plus récent Dungeon of the Endless (dont l’aperçu est disponible ici d’ailleurs) ? Il faut dire qu’en seulement trois jeux, le studio a connu un véritable essor grâce à l’exploitation de l’univers « Endless » ambiance science-fiction fouillé, à leurs mécaniques de jeu bien huilées et surtout, à la volonté d’impliquer le joueur dans le développement de leurs titres via une plate-forme d’échange entre communauté et créateurs. Bref, le capital sympathie d’Amplitude est à la hausse, reste à savoir si Endless Legend, sorti le 18 septembre 2014, sera à la hauteur de ses prédécesseurs.
Bienvenue sur Auriga
Si l’on se fie à la chronologie de l’univers, Endless Legend prend place, tout comme Dungeon of the Endless, bien avant les événements d’Endless Space. Il s’agit donc d’une préquelle qui se déroule ici exclusivement sur une planète centrale dans la mythologie de cet univers : Auriga. En effet, Auriga a été pendant longtemps le théâtre de conflits majeurs qui se terminèrent avec la disparition des Endless, une race antique à la technologie avancée.
S’il est impossible d’évoquer l’univers de ces trois jeux sans abuser du terme « Endless », c’est parce que ce dernier en est le ciment. Les Endless ont façonné cet univers, dans un premier temps par leur puissance et dans un second temps par tout ce qu’ils ont laissé derrière eux : vestiges, technologies du passé…
Mais revenons-en à l’époque « Legend ». Vous, en tant que joueur, incarnez l’une des huit races peuplant désormais la planète moribonde d’Auriga. Comme tout bon jeu de stratégie aux quatre X (Exploration, Expansion, Exploitation, Extermination), votre rôle sera de guider votre peuple vers la suprématie. Et comme tout bon jeu de stratégie à la sauce Civilisation, cette suprématie ne suppose pas nécessairement qu’elle soit martiale. Selon votre style de jeu et votre race, il pourrait être plus intéressant de dominer le monde par la ruse et la diplomatie, non pas par le fer et le sang.
Un tutoriel salvateur
Lors de sa sortie en très early access sur Steam en avril dernier, j’avais déjà tenté l’aventure Endless Legend. Malheureusement, et je dois l’avouer à ma grande honte, l’absence de tutoriel et un jeu entièrement en anglais m’avait rebuté. Il faut bien comprendre que débuter sur un jeu comme Endless Legend sans un petit coup de main est loin d’être aisé tant les possibilités sont nombreuses. Et si je n’ai pas de difficultés particulières avec l’anglais, j’avais eu beaucoup de mal à deviner le sens de certains mots – le vocabulaire spécifique au jeu y était pour beaucoup.
Depuis cette époque, les développeurs d’Amplitude ont traduit leur titre en français et ont ajouté une mini campagne en guise de tutoriel. À la bonne heure ! J’ai donc réinstallé le jeu pour la seconde fois avec une certaine appréhension, rapidement balayé par une réelle excitation. Endless Legend s’offrait enfin à moi ! C’est donc tout naturellement par le tutoriel que j’ai commencé à jouer.
Cette phase d’apprentissage se déroule de manière très classique. Votre liberté d’agir, tout comme lorsque vous apprenez à conduire, sera restreinte par un formateur qui va vous accompagner pas à pas dans les premières phases de jeu. Créer une ville, lancer ses premières recherches scientifiques et ses premiers chantiers, gérer ses ressources et ses troupes… Bref, le parfait cours pour débutant. Si comme beaucoup, j’ai été tenté de comparer Endless Legend à Civilisation, j’ai très vite compris que si de nombreuses bases sont communes, le titre d’Amplitude sait se démarquer. Après un tutoriel somme toute très court, je décide de lancer ma première partie en totale autonomie.
À la conquête d’Auriga
Lancer une partie en solo vous demandera déjà une certaine réflexion. Si le choix de la race vous paraît cornélien – huit peuples tout de même – de nombreux paramètres sont configurables. Taille de la carte, nombre d’IA présentes, conditions de victoire, climat, difficulté, vitesse de jeu… Bref, du classique mais qui donne réellement l’impression d’avoir la main mise sur chaque petit détail de notre future épopée. En parlant des races, elles ont toutes leurs spécificités et leurs propres champions, il convient ainsi de les essayer pour dénicher son peuple chouchou. Les Seigneurs Déchus par exemple, peuvent acheter leurs citoyens en dépensant de la brume, ce qui permet un départ éclair. Les Drakkens, eux, sont d’excellents diplomates. À vous de voir vis-à-vis de vos penchants. Bref, après avoir choisi mon peuple (les Drakken) et avoir vaguement personnalisé ma partie en difficulté normale, je me lance.
Si les bases du jeu m’ont été enseignées via le tutoriel, il me faudra tout de même un certain temps d’adaptation avant d’être à l’aise avec l’interface et toutes les possibilités qu’elle recèle.
Si l’ergonomie souffre de légers défauts – je n’ai pas trouvé de bouton ramenant directement à sa capitale par exemple – celle-ci est d’une clarté exemplaire. Chaque menu est facile à retrouver et la gestion de la ville se fait très simplement. D’un seul coup d’œil, il est possible de consulter de nombreuses informations telles que le nombre de jours restant avant la construction du prochain chantier ou les ressources consommées et produites à chaque tour. Les différents menus, que ce soit la recherche scientifique, son journal de quête en cours ou la table diplomatique, demandent à être apprivoisés avant d’être maîtrisés certes mais une fois cette période d’apprentissage terminée, rien ne pourra vous arrêter dans votre ascension vers la domination d’Auriga.
Tout comme Civilisation, les premières minutes de jeu sont relativement calmes puisqu’à part son héros à envoyer en exploration et quelques ordres à donner à sa cité, il n’y a rien de bien croustillant à se mettre sous la dent. Et puis très vite, le jeu prend une nouvelle dimension. Les races voisines commencent à s’inquiéter ou à se réjouir de notre présence, notre cité gagne de l’ampleur et l’on découvre le système de quête. En effet, disséminées sur toute la carte se trouvent des factions mineures qui n’appartient qu’à vous de visiter. Souhaitez-vous dominer le monde par la puissance militaire ? En ce cas, ces factions seront un bon moyen de mettre vos troupes à l’épreuve. Au contraire, vous aspirez à la paix et à l’entente entre les peuples ? Alors soyez à leur écoute car eux aussi sont parfois en difficulté et ont besoin de votre aide. Si vous jouez leur jeu, ils verront certainement votre expansion territoriale d’un meilleur œil.
Ces factions peuvent sembler optionnel dans le plaisir de jeu mais il n’en est rien. Avec de la diplomatie ou une armée, vous pourrez par la suite les annexer, ce qui aura pour conséquence de vous apporter divers bonus et la possibilité de recruter certaines de leurs troupes.
Le RPG caché
J’évoquais plus haut les quêtes mais ce système est loin d’être le seul qu’emprunte Endless Legend au RPG. La plus grosse particularité de ce jeu selon moi, c’est la gestion des troupes. À l’instar d’un Warcraft III, vos héros gagneront en expérience à mesure des batailles et des découvertes. Il conviendra alors de dépenser des points d’expérience dans l’une ou l’autre des trois branches de compétence disponible. Encore une fois, le choix de cette répartition se fera selon votre stratégie. Préférez-vous mater vos ennemis par la force ou déciderez-vous de faire de votre héros le gouverneur de votre cité, lui apportant à ce titre toute sa sagesse et les bonus qui vont avec ? Si je n’ai pas trouvé cet arbre de compétence d’une utilité folle dans les premiers niveaux, il faudra atteindre les derniers paliers pour obtenir des effets conséquents.
En dehors des compétences, vous pourrez équiper votre héros pour la guerre : épée, casque, bouclier, bijoux aux pouvoirs divers… Choisissez bien ce qu’il porte car votre champion, lors des batailles, participera lui aussi au conflit. Mais ce n’est pas tout ! Si votre héros gagne de l’expérience et sera personnalisable grâce à l’équipement, l’ensemble de votre armée le peut également.
Lorsque vous produisez des troupes, deux possibilités : garder le modèle de base ou créer votre propre gabarit d’unité. Cette seconde option sera nécessairement plus coûteuse mais vous permettra de sortir des troupes plus puissantes. Avec le temps et l’expérience, vos hommes gagneront ainsi en force et il ne sera pas rare de voir vos premières unités survivre pendant toute une campagne et atteindre un niveau plus que respectable. Une feature qui me rappelle un certain Warlord Battlecry pour ceux qui connaissent.
Un système de combat inégal
S’il y a bien une critique que je puisse faire à Endless Legend, c’est son système de combat. Malgré la présence d’un côté RPG, un héros à l’équipement et aux compétences personnalisables et aux troupes accumulant de l’expérience, livrer une bataille est de loin l’activité la plus ennuyante du jeu. Je m’explique.
Lorsque vous donnez l’ordre à votre armée d’engager le combat, de nombreux éléments du décors disparaissent pour laisser place à un champ de bataille. À partir de là, vous aurez le droit à une phase de déploiement qui ressemble à ce que proposait Heroes of Might and Magic, c’est à dire un instant privilégié où vous pourrez replacer vos troupes de manière optimale, le plus souvent les tireurs derrières et les bourrins devant. Une fois votre positionnement validé, le combat peut commencer. Et si un système au tour par tour est bien présent, il se révèle rapidement lourd à gérer puisque vous donnerez l’ensemble de vos ordres d’attaque, de défense ou autre avant l’affrontement. Une fois les ordres donnés, il suffit de valider pour voir comment réagissent vos troupes. Malheureusement, et c’est là que le bât blesse, vos hommes feront parfois n’importe quoi plutôt que d’attaquer puisqu’ils s’adapteront (mal) aux changements survenus sur le champ de bataille. Frustrant. De plus, il est difficile de retrouver le fun d’une bataille puisque la plupart des actions se régleront en automatique et non au cas par cas comme c’est le cas avec Heroes justement.
Ceci est bien entendu à prendre avec des pincettes. Il s’agit ici d’un avis personnel et je vous invite chaleureusement à vous faire votre propre opinion sur la question. Toujours est-il que personnellement, si je peux régler un conflit de manière pacifique, je ne m’en prive pas.
Plein les mirettes, plein les oreilles
Comment parler d’un jeu sans évoquer sa direction artistique ? Ici, Endless Legend a bénéficié d’une réalisation de haute volée. Les différentes races possèdent une véritable identité visuelle et parcourir les terres d’Auriga est un plaisir tant elles fourmillent de détails et de couleurs. Et que dire de la première fois que l’hiver tombe sur votre peuple et que toute la carte se recouvre de neige ? Magnifique.
L’autre point fort d’Endless Legend est indubitablement sa bande-son. Réalisé par le même compositeur qu’Endless Space, il s’agit d’une véritable merveille à l’écoute. Celle-ci est tantôt calme et mystique, tantôt épique mais le plus important, elle s’accorde toujours parfaitement à l’ambiance fantaisiste et dramatique du jeu.
Le mot de la fin
Ce test aurait pu être beaucoup plus long mais dans une optique de synthèse, je ne pourrais malheureusement pas passer en revue toutes les possibilités de ce Endless Legend tant elles sont nombreuses. En revanche, je me dois de vous souligner les points noirs de ce jeu qui sont fort heureusement assez peu nombreux.
Tout d’abord, et c’est la particularité des 4X de ce genre, chaque partie peut être longue, très longue. Et si je n’ai pas expérimenté l’ensemble des modes de difficultés, il faut bien comprendre que selon ce choix, vous passerez soit une partie trop facile – j’étais premier sur six à ma première tentative de débutant en normal – soit une partie beaucoup plus compliquée. Logique, me direz-vous mais contrairement à un Starcraft, ou une difficulté excessive se ressentira dans les premières minutes de jeu, c’est seulement au bout d’une heure que vous vous rendrez compte que vous allez de toute façon perdre. Pour connaître ses limites. Mais dans l’opération, gageons que vous aurez tout de même appris de vos erreurs et que votre prochaine partie sera plus efficacement menée.
L’autre détail qui m’a dérangé dont j’ai déjà parlé : les batailles. Après avoir beaucoup baroudé sur Heroes of Might and Magic, je m’attendais à des conflits aussi dynamiques et pêchus alors qu’il n’en est rien. La stratégie prend finalement peu de place ici puisqu’une bataille sera pour la plupart du temps gagnée ou perdue à l’avance selon les effectifs et les divers bonus engrangés. De même, puisque nous donnons nos ordres à toutes nos troupes avant de lancer un tour de bataille, j’ai souvent été frustré de constater que telle unité décide de ne pas attaquer sans en comprendre la raison. Je suis sûr que cette particularité sait se faire adopter avec le temps mais c’est un détail qui m’a passablement frustré, au point que les rares conflits que je lance se règles désormais en automatique – un clic et la bataille est terminée.
Donc, ne nous voilons pas la face, Endless Legend n’est pas un jeu parfait mais il contient suffisamment de bonnes idées et des mécaniques de gameplay assez originales pour vous permettre de passer de bons moments en compagnie des Vaulters, des Seigneurs Déchus ou encore des Drakken à la conquête des terres d’Auriga. Et si jamais l’expérience vous plait en solo, vous aurez tout loisir de mesurer votre talent en multijoueurs puisqu’il existe un mode online qui est certes encore très peu utilisé par les autres joueurs mais qui saura trouver sa place d’ici quelques temps grâce à ses nombreuses options de configuration – sensiblement les mêmes qu’en solo – et la possibilité de jouer jusqu’à huit. De quoi occuper les longues soirées d’hiver qui nous attend.
Alors, ce Endless Legend, vous en avez pensez quoi vous ?
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Review
Pros | Cons |
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- La direction artistique - La musique - La richesse du gameplay - L'univers Endless - La durée de vie colossale |
- Prise en main peu évidente |
Rating |