Test : Antichamber – Proche de la perfection ?
Alors qu’Antichamber vient à peine de sortir aujourd’hui – 31 Janvier, 19h – sur Steam, nous proposons aux lecteurs de Game Sphere un test concocté avec amour pour un jeu pas comme les autres. Et dire qu’il ne sera pas simple d’exprimer sur papier la nature de l’expérience proposée par Alexander « Demruth » Bruce, est un doux euphémisme.
Antichamber est un jeu de réflexion aventure à la première personne prenant place dans un environnement labyrinthique escherien et non euclidien. Les règles de géométrie classique y sont totalement bouleversées et les architectures impossibles font loi. Nous avions déjà pu voir ce que pouvait donner l’utilisation de la géométrie impossible escherienne dans l’excellent The Bridge, qui déjà obligeait le joueur à revoir sa manière de réfléchir un jeu et déconstruire ses conceptions de l’espace. Et c’est bien de cela qu’il s’agit quand on pénètre dans l’univers d’Antichamber. Mettre de côté ses représentations, sa logique physique et géométrique pour embrasser de nouvelles conceptions qui rendront l’expérience inoubliable. Il est de ces jeux qui non seulement vous apportent un plaisir de jeu immense mais également vous proposent une réflexion intellectuelle sur leur propre nature. Mais ne vous y trompez pas, il ne s’agit pas pour Alexander Bruce de vous apporter des réponses à des questions jusque là peu traitées, mais plutôt de questionner vos représentations d’Antichamber, vos habitudes de joueur et les jeux vidéo-ludiques de manière plus générale. Mais rassurez-vous, tout comme il ne sera pas question d’apporter de réponses aux questionnements qui vous seront proposés pendant vos parties, le jeu n’adoptera pas non plus une posture arrogante et supérieure par rapport au joueur car à aucun moment le jeu fait preuve d’une quelconque prétention à vous enseigner quoique ce soit.
Que reste t-il donc ? Le plaisir pur et simple. Et je ne mâcherai pas mes mots, Antichamber est une pure merveille, proposant une expérience complète et un plaisir sans précédent.
Antichamber commence sans cinématique, introduction ou menu principal. Vous êtes directement immergé dans le jeu via un hub dans lequel vous pourrez régler certaines options (maniabilité, résolution, etc), accéder à une carte du labyrinthe pour effectuer des déplacements rapides. Ainsi, dans le cas où vous êtes perdus, vous n’avez qu’à presser « Echap » pour revenir dans ce hub. Dans cette antichambre vous pourrez également observer un pan de mur noir sur lequel apparaîtront au fil de l’exploration des petites illustrations associées à de courts textes et instructions, trouvées dans le labyrinthe. Ces « tableaux » sont au nombre de 120, mais sachez qu‘il n’est pas essentiel de tous les trouver pour terminer le jeu. A ce sujet, à la suite d’une discussion avec Alexander Bruce, ce dernier m’a affirmé que la quête des 100% n’avait pas de sens et qu’elle n’était pas l’objectif premier d’Antichamber. Plusieurs « tableaux » vous suggèrent d’ailleurs qu’atteindre la fin, n’est pas toujours une finalité, mais que c’est le parcours et les épreuves accomplies qui comptent réellement. Par ce petit tour de passe passe, le développeur nous transmet un message fort, Antichamber est une allégorie de la vie. En comparant l’arrivée immédiate dans le jeu à la naissance (pas de menu, de prise de décision telle que « commencer la partie ». On est, un point c’est tout) le parcours d’Antichamber/ les épreuves/ difficultés/ l’apprentissage/ le gain d’expérience à la vie, et la fin du jeu à la mort (comprenez l’arrêt de la vie) Demruth nous permet d’expérimenter ces deux concepts en les manipulant, en les transformant en sensations de jeu. Pourquoi vouloir finir le jeu quand le terminer signifie la fin de l’expérience ?
La grande majorité des énigmes et puzzles qui jonchent la progression de l’exploration ne sont finalement que des questions et remises en cause de vos connaissances, de votre expérience. Dès que vous entrez dans l’antichambre, vous connaissez déjà toutes les réponses, il suffit simplement d’aller les chercher et les appliquer dans cette allégorie qu’est Antichamber. Un élément représentatif de cette approche est le placement intelligent des « tableaux » qui ne vous donnent la réponse à une énigme qu’après l’avoir déjà résolue.
Autant le dire tout de suite, vos habitudes de joueur seront complètement malmenées par Antichamber, et il vous faudra mettre tout ça de côté, comprendre cette nouvelle logique pour progresser de manière régulière. Pour cela, les premières minutes de jeu seront cruciales, car ce qui fait office de « tutoriel » (attention: ce n’est pas un tutoriel) n’est en vérité que la partie la plus dure du jeu puisqu’il vous faudra tout oublier de ce que vous savez afin de reconstruire un ensemble de connaissances qui vous mèneront à la fin. En somme, vous ne cessez jamais d’apprendre de nouvelles choses.
Ces « nouvelles choses » tiennent de l’ordre de notre expérience de la vie: qu’il s’agisse d’un simple choix de prendre la voie de gauche ou de droite, de toucher ou non la porte du four car on nous a dit qu’elle était brûlante, de faire machine arrière quand on pense commettre une erreur ou simplement de persévérer dans des choix déjà faits.
Voilà pour ce qui est de la description d’Antichamber, son essence même. Il avait été jusque là extrêmement difficile de décrire ce qu’était ce jeu qui ne pouvait en vérité se comprendre qu’en y jouant. Mais alors, quels moyens ont été mis en oeuvre par Alexander Bruce pour parvenir à nous communiquer tout cela ?
L’esthétique d’Antichamber tient de l’utilisation du style très épuré line art. Cette technique artistique surtout utilisée en dessin fut beaucoup utilisée par le graveur Gustave Doré ou encore par M.C. Escher dans ses travaux sur la géométrie impossible. On retrouve également l’influence d’autres physiciens-mathématiciens comme Penrose.
Le style graphique d’Antichamber est néanmoins plus coloré et pour cela, Alexander Bruce utilise un ensemble de couleurs primaires et leur synthèse additive (lumière). Les couleurs primaires bleu, vert et rouge (ainsi que le jaune: couleur primaire – en peinture – empruntée à la synthèse soustractive) sont associées à autant de « fusils » différents. A vous de trouver et récupérer chacun de ces guns, chacun vous ouvrant de nouvelles possibilités.
Les couleurs joueront donc un rôle prépondérant dans la résolution des énigmes, vous servant parfois d’indices ou de points de repères lors de certains puzzles. Il vous sera aussi possible – essentiel – de récupérer avec votre arme (qui n’en est pas une) des blocs de couleur afin de les réutiliser ailleurs.
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Quelques mots concernant la bande son qui reste très discrète tout au long de l’aventure, mais contre laquelle on trouve peut de choses à redire. Et même s’il est certain qu’Antichamber ne sera pas loué sur le contenu et la qualité de cette dernière, c’est simple, épuré et efficace.
La maniabilité quant à elle reste sans faille et très efficace. Tout comme l’esthétique et la bande son, elle reste simple et aisée à prendre en main, ce qui est il me semble logique pour un jeu comme celui là. A cela s’ajoute une durée de vie excellente: 8 heures si vous réussissez à trouver la fin rapidement et 12 heures si vous souhaitez tout découvrir (toujours à un rythme de progression soutenu). Pour ceux qui préféreront prendre leur temps ou butteront sur de nombreux puzzles avant de trouver la solution, ils pourront tabler sur une bonne quinzaine d’heures de jeu pour finir le titre à 100%, en sachant que le premier tiers du jeu est le plus rapide. Si cela ne vous satisfait pas, vous pourrez alors vous consoler sur les nombreux secrets intelligemment cachés un peu partout, et essayer de trouver une section dans laquelle vous serez confrontés à des puzzles jugés trop obscurs pour être utilisés dans tout autre section du jeu.
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Pour terminer, il faut être bien conscient qu’attribuer une note à ce jeu est une chose extrêmement ardue compte tenu de sa nature. Il parait juste de considérer l’avis des joueurs qui n’y verront aucun intérêt, n’auront pas la patience ou la ténacité (sans chercher à mettre les autres sur un piédestal) de passer ces premières minutes – potentiellement – déconcertantes du jeu; et ces derniers auraient surement raison et mettraient une note sévère bien en dessous de la moyenne. Seulement, il apparaîtra évident à ceux qui se plongeront entièrement dans le jeu et adopteront totalement sa logique, qu’Antichamber est sans nul doute possible une perle vidéo-ludique comme nous en trouvons peu de nos jours.
Résumé
Les + | Les - |
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intelligent, excellence en terme de game design, level-design, gameplay, durée de vie | rebutant (?), dur (?) |
Score du jeu : |
Vraiment rebuté par les screenshot du jeu dans un premier temps, la vidéo m’a ensuite bien donné envie de tester en voyant tout ça animé.
Et wow 99% tu mets rarement des notes comme ça, je sens que ça finir de me convaincre de me le prendre !
Le jeu est, depuis une heure après sa sortie, n°1 des ventes Steam. Et je n’ai pas encore lu de mauvaises critiques. 99% est une note extrême c’est sûr, mais je ne l’aurais pas mise si je n’y croyais pas. On pourrait surement tabler sur un 80% si on accrochait que moyennement au concept. Cela dit, c’est pas un ovni vidéo-ludique qui est à peine un jeu (comme on peut en trouver parfois: genre jeux concepts Dear Esther, Proteus et j’en passe) c’est un véritable jeu intelligent et qui possède tout ce qu’il faut. Je me suis éclaté en y jouant, et c’est très prenant.
Je ne peux que te conseiller de le prendre, je l’ai moi même acheté juste à sa sortie même si j’avais déjà la version presse. Et puis le dev m’a dit que dans la version finale il rajouterai certains trucs (une salle secrète qui jusqu’à présent était vide, quand j’y était parvenu c’était juste une salle blanche cul de sac)
Oui oui, je te fais confiance pour la note Tu l’as fini à 100% au fait ?
Ouais à 100%. Et franchement, même si le dev dit que c’est pas obligé, une fois que j’étais dedans j’ai pas pu ne pas rechercher tous les tableaux, résoudre tous les puzzles et trouver tous les secrets (qui sont franchement cools, ça vaut carrément le détour !)
Mon Dieu ce jeu m’a l’air des plus intéressant . Je me demande quand doit arriver la version Mac d’ailleurs ça me fait penser que Hotline Miami n’a toujours pas été adapté pour Mac.
Aucun portage prévu pour l’instant. Il n’en a jamais été question. Cela dit, vu le succès de son jeu, le développeur reverra peut être ses prévisions (même si Mac n’est pas un marché qui rapporte à mort pour les développeurs de jeu)
Antichamber, magnifique, tout comme ce test ! ^^
Bravo
Interview en préparation. Attente des réponses puis traduction et hop. J’espère que ce sera publié dans pas trop longtemps
Le jeu s’est vendu à 100 000 copies.. sacré chiffre.