Nowhere : en avant pour le néant !
Je ne sais pas si vous êtes un peu portés sur la physique, la physique quantique ou encore fantasmalgorythmique mais il paraît que ce qu’on voit ne représente en fait que 10% de l’univers. Ça vous la coupe, non ? Moi oui. À côté de ça, peut-être qu’en grandissant cela nous sort de l’esprit au profit de la facture d’électricité ou de l’achat d’un nouveau PC, mais il y a aussi la question de l’infini de l’univers : est-ce qu’il y a un mur, les lois de la physique telles que nous les concevons s’appliquent-elles à une étendue qu’on ne peut pas appréhender ? Et l’infini, késako ? Mais répondez-moi !
Une seule certitude dans ce fatras de questions : tout ça est invisible à nos yeux. Si on devait le situer, on le rangerait… Nulle part ; NOWHERE. Nulle part et partout. Mais ça ferait sûrement un peu long d’appeler un concept le NOWHERE AND EVERYWHERE. De fait, on va dire que les développeurs ont pensé à la même chose que moi en appelant leur jeu Nowhere. Et, même s’il n’est pas encore sorti, il semble être parti pour se diriger vers la bonne direction, vers un endroit qui nous tend les bras mais qui ne nous laissera pas forcément repartir pour autant.
Où se trouve cet endroit ? Mais partout. Sous les touches de votre clavier, à l’intérieur de vous, de moi. Je sens d’ailleurs déjà de l’agitation dans mon encéphale gauche. Autant savoir ce qui s’y trame.
Partout et nulle part.
Nowhere, si l’on voulait se le figurer, s’envisagerait d’avantage comme un concept que comme quelque chose de précis. Par conséquent, le titre se propose de prendre place dans un endroit gigantesque, où le temps et la distance ne sont que des idées, aussi malléables que l’est une pensée. Imaginez que vous êtes un piéton, sur le point de traverser une route dont vous ne voyez pas le bout, parcourue d’une multitude de véhicules, roulant à toute vitesse. Vous pouvez tout aussi bien vous faire emporter par un de ces véhicules, être écrasé ou bien arrivé à l’autre rive sain et sauf. Le point essentiel à retenir est que cela aura un impact sur votre prochaine traversée. Qui sait si, cette fois, vous serez véhicule ou piéton.
Sur cette grande route, où chacun se déplace à sa manière, porté par ses jambes, par des roulettes ou encore d’énormes roues, filant à une vitesse hallucinante ou avançant pas à pas, vous ne pouvez qu’être sûr d’une chose : vous y avancez, en même temps que tous les autres et à l’intérieur de tout un chacun. Vous y tenez la place du rien et du tout, ce qui a pour spécificité de donner conséquence au moindre de vos actes. Ne vous imaginez donc pas pouvoir vous faire écraser pour recommencer aux commandes d’une énorme cylindrée ensuite, cela aura forcément des conséquences inattendues.
Évolution, le maître mot de Nowhere.
Nous voilà donc dans le vide, une sorte de néant, parsemé d’éléments phosphorescents. Et c’est ma foi bien beau, mais il va falloir que vous y fassiez votre apparition, que vous y jouiez votre rôle ; car vous avez bien un rôle à y jouer. Les « Nowherians », êtres naissant sous une apparence translucide, proche de celle d’une amibe, suivent un schéma comportemental assez proche du nôtre. La famille y est donc prépondérante. Une bonne occasion de vous faire naître. Vous surgissez donc, petit Nowherian, enfant de parents de la même espèce et vous apprêtez à faire votre bout de chemin dans ce grand vide qui semble finalement bien rempli.
Mais n’allez pas imaginer que nous sommes aux prises avec un endroit uniquement teinté de bleu nuit, faiblement éclairé par quelques milliards d’amibes fluorescentes. Une particularité des Nowherians est de se transformer, au fil du temps, en des formes aussi diverses que variées. Par ce biais, les développeurs ont mis en place un univers totalement en phase avec leur thématique de départ : le néant, partout et nulle part. Je m’explique :
En tant que Nowherian, j’évolue au sein du vide, explorant les divers groupes et sociétés constitués par mes congénères. Mais ces groupes ne se contentent pas que de migrer d’un point A à un point B, il arrive que certains se sédentarisent dans ce qui semble être une ville. Là où se trouve l’astuce, c’est que ces villes ne sont pas de la matière morte et utilitaire, mais bien un de vos comparses qui aura évolué vers une forme plus développée, monumentale. Et, à l’intérieur même de ce système vivant se met en place un système social, politique, affectif, etc. En poussant un peu plus loin l’analyse, vous prenez très vite conscience que si votre système existe à l’intérieur d’un tiers, celui-ci appartient probablement à un autre système, plus grand mais moins visible à vos petits yeux, et ainsi de suite. Où donc commence et s’arrête le néant, qu’y a-t-il à l’intérieur de vous-mêmes ?
Sociabilisons-nous un peu !
C’est bien connu, vivre en communauté rend obligatoire la création d’un minimum de règles. Une fois ces règles établies arrivent le mécontentement, la joie des uns et la frustration des autres. Je vous renvoie à n’importe quel ouvrage de socio vulgarisée, nous ne sommes pas là pour ça et je vous raconterais des énormités. Mais les Nowherians suivent bel et bien un schéma social semblable au nôtre. Brièvement : politique, commerce et, évidemment, guerre.
Hormis le fait de vivoter d’un néant à un autre, il vous échoira donc la tâche difficile que d’être un citoyen Nowherian modèle. Ou peut-être d’y implanter le concept de truand, qui sait ? Ou encore de devenir un monstre à l’appétit aussi développé que l’est son abdomen . Aux travers de commandes qui devraient être à priori simples pour ne pas « entraver » l’expérience du joueur, des possibilités infinies s’offrent à vous, de sorte qu’on ne devrait jamais vraiment se trouver réellement bloqué.
Nowhere semble promettre plus que ne l’ont fait la plupart des jeux en open world. Ne vous plongeant pas dans le vif du sujet d’emblée, une liberté totale nous est laissée avant que ne nous soit dévoilé ce qui devrait être le pilier central du scénario de Nowhere, pour l’instant inconnu ; scénario qui semble devoir d’avantage relever de la « révélation cosmique », par ailleurs.
Le titre semble tellement promettre que nous ne pouvons qu’espérer que les développeurs sauront s’en tenir à leur ligne pour nous délivrer une création aussi folle et fournie en questionnements et réflexions en tout genre qu’elle se doit de le faire. Mais, en l’état, avec son open world aux conditions variables et les différentes réincarnations suivant nos morts (ainsi que leurs conséquences, car rien ne sera inutile), Nowhere a tous les arguments nécessaires pour nous faire baver d’impatience.
Plus qu’un monde, Nowhere nous propose le néant, sans limite. Et ce n’est pas pour nous déplaire, si ce n’est cette question récurrente : à l’intérieur de quel néant se trouve-t-on ?
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